L'engrenage des crédits à la consommation
Romain, 52 ans, éleveur de vaches laitières
Romain s'installe en 1984 dans la ferme de 14 ha de ses grands-parents retraités : « il fallait tout faire à la fois, acheter le troupeau, le matériel, rallonger le bâtiment, rembourser ma sœur de la moitié des terres ».
Il obtient la DJA, (dotation jeune agriculteur), une subvention qui lui permet d'emprunter à des taux très bas. La ferme doit s'étendre pour lui assurer un revenu, il rachète 8 ha et en loue 52 autres. Il augmente son cheptel de vaches laitières, d'aujourd'hui 75 têtes.
Progressivement, les difficultés s'installent : « Au début, ma grand-mère vivait avec moi, elle est partie en maison de retraite en 1995 ». Coup dur, célibataire et sans enfant, il se retrouve seul à travailler : « Quand elle décède en 2000, le complément qu'apportait sa retraite disparaît et les gros problèmes financiers commencent ».
Romain quitte le Crédit Agricole et comme il n'a plus accès aux emprunts bonifiés agricoles, il rembourse avec des crédits à la consommation. « Tout va très vite, j'en ai eu jusqu'à 15 », raconte-il. « On a toujours l'espoir de s'en sortir, même quand la production va bien, mais avec des emprunts à 20%, la dette ne fait qu'augmenter. Je me disais, demain ça ira mieux, j'ai tenu tant bien que mal une dizaine d'années mais quand les huissiers arrivent… Ils sont hargneux, toujours froids, ils veulent de l'argent tout de suite. Je leur donnais un chèque à encaisser dans un mois, mais le mois d'après c'était toujours pareil ! J'ai fini par ne plus répondre au téléphone, ni ouvrir le courrier. Je fuyais la maison. Ça a duré trois ans et un jour j'ai appris l'existence de Solidarité Paysans en lisant le journal Le Paysan d'Auvergne ».
Dans un premier temps, un redressement à l'amiable est refusé car les sommes dues sont trop importantes. Il faut aller au tribunal. Situation angoissante, mais il est accompagné par Solidarité Paysans. Le tribunal de Grande Instance accepte un redressement judiciaire puisque qu'il s'agit d'une exploitation qui tourne. Elle est mise en cessation de paiement, et les créanciers ne peuvent plus intervenir directement. Les dettes sont gelées et étalées sur 15 ans.
Romain, aujourd'hui la cinquantaine, respire, reprend confiance et les choses en main.
« Je continue mon travail, avec mon chien pour compagnie et un peu de télé en soirée ».